Petite Joie

Nous étions à présent au cœur de la forêt, et la vie grouillait autour de nous. J’avais l’impression que même les arbres bougeaient silencieusement, que la moindre touffe d’herbe était douée d’une âme et de conscience. Frémissante d’excitation, je tournai sans cesse la tête, tout en suivant les pas de mon camarade plus expérimenté. Soudain, ce dernier m’intima le silence d’un signe de queue. Qu’il y avait-il ? Je reniflai l’air, tous mes sens en alerte. Malgré mon ouïe et mon odorat aiguisé, j’étais encore trop jeune pour repérer ce qui avait attiré l’attention du chaton. Il s’approcha à pas feutrés d’un buisson, et sauta sur ce que je crus être un tas de feuilles mortes, mais qui en réalité était une petite souris. Après l’avoir tuée, le jeune chat blanc la ramena à moi et en prit une bouchée. Une goutte de sang perla d’une blessure que je n’avais pas vue sur sa patte, sûrement infligée par la souris agonisante. Avant que je ne puisse lui demander s’il voulait aller voir Fleur de Pas-d’âne, il s’approcha de moi et souffla :

- Ne t'inquiète pas j'ai connu pire, cela va passer je n'ai rien, je ne sens rien.

Je lui souris, rassurée et un peu impressionnée. Ainsi il avait connu pire ? Ce n’était sûrement pas sa première proie, si il était si expérimenté que ça. J’enviai soudainement sa mère, qui avait un petit aussi génial. Presque apprenti et déjà bon chasseur ! J’en mourrai d’envie. Je pris une bouchée de la souris (ce qui la finissa) et me releva. Je recommençai à suivre Petit Trèfle, et nous nous enfonçâmes encore plus dans la forêt. Plus on s’enfonçait, plus j’étais excitée. Nous arrivâmes à une clairière superbe, fourmillant de mille herbes et plantes inconnues de la petite chatte que je fus. Reniflant chaque fleur, m’émerveillant de tout, je sautillai comme un papillon d’arbre en arbre, de blanche en branche, de feuille en feuille. Passionnée par mes découvertes, je n’entendis pas tout de suite le bruit. Et puis il augmenta tellement que je ne puis l’ignorer. Me tournant vers mon camarade, je l’interrogeai du regard, paniquée. C’était un bruit de pas assourdissant, qui emplissait tout l’endroit ou nous nous trouvâmes. La fourrure hérissée par la peur, je sortis les griffes…

(Super maman à la rescouuuusse !)

Cendre du Phénix rentrait d'une partie de chasse bien méritée. Elle voulait chasser depuis qu'elle avait reprit l'entrainement avec Nuage Mélodieux et ses petits avaient cinq lunes, assez pour se débrouiller seuls quand la noiraude sortait dans les landes. Elle étai contente de voir que son apprentie apprenait vite et elle ne manquait pas de vanter ses exploitsauprès des autres guerriers. Elle était devenu un membre à part entière de sa famille, Anis Etoilé le comprennait sûrement ! Elle ne voulait pas s'engueuler avec son compagnon, pas maintenant. Elle rentra au camp, avec pour unique proie en gueule un lapin et alla le poser sur la pile de gibier. Ses miscless'étaient ramolis, elle avait presque passé 12 lunes en pouponnière pour s'occuper de la portée d'Anis Etoilé puis de celle d'Etoile du Rapace ! Elle s'enuyait à mourir dans l'espace clos. Mais maintenant, elle pouvait se vanter d'être une reine, une vraie. Elle avait allété deux fois en une année, ce qui sortait du commun. Elle posa sa prise, alla parler à quelques chasseurs pour les ordres du jour et retourna à la pouponnière. Le soleil lui réchauffait l'échine, c'était un véritable bonheur ! Là, elle tomba sur Petit Dragon, faisant sa toilette, seul.


« Petit Dragon ? Où sont tes frères et soeurs ? »
« Chez les anciens, sauf Petit Trèfle, il est à la chasse ! »
« Quoi ? »
« Il a dit qu'il était parti dans les landes avec Petite Joie. »


Le sang de la lieutennate ne fit qu'un tour dans ses veines. Elle ne songea même pas à poser des questions ou enguirlander le chaton, elle fit juste volte-face et traversa le camp, véritable foudre noire. Elle sortit du tunnel de ronces sans faire attention aux épines qui griffèrent son museau et se mis a courir. Elle tenta de reperer les gamins mais rien n'y fit, le vent était derrière elle. Soudain, elle entendit un cri ténu, venu du lointain. Sans se faire prier, elle accourut comme elle put. S'il arrivait malheur à Petit Trèfle, elle ne s'en remettrait jamais... Enfin, elle trouvait le chaton. Horreur ! Un blaireau des landes, trouvant la proie facile, l'avait déjà attrapé par la queue, et menaçait de lui briser le crâne d'un coup de patte. La guerrière poussa un ci e terreur et laissa ses pattes la guider vers la bête. Elle ne savait pas ce qu'elle faisait, mais elle le fit. Elle se dressa sur ses pattes arrièrs devant la bête et lui asséna un coup sur le museau, bien que peu puissant. Sous l'effet de la surprise, le prédateur lacha le chaton, que la mère prit soin de récupérer dans sa gueule. ce n'était pas le moment de perdre inutilement la vie ! Elle se retourna et hurla -indistinctement à cause de Petit Trèfle en gueule- de dégager sur le champ (en gros ça donne "dégaphe fur le famp !"). Elle se prépara à courir, mais le blaireau abattit à ce moment ses puissantes pattes sur les hanches de Cendre du Phénix. Elle couina mais rassembla ses forces pour courir, fuir loin, malgré la douleur aigue qui lui rongeait le bassin. Elle courut, elle courut... Elle ne voulait plus voir ce blaireau. Elle ne prit mêe pas la peine de voir si Petite Joie était toujours là qu'elle lacha son gamin sur l'herbe et renifla son chaton.


« Oh non, oh non, tu es vivant dis ? Tu es vivant ? »

Je me préparais au coup fatal, celui qui m'achèverais devant mon amie, je ferma les yeux en murmurant un "au revoir" pathétique, lorsqu'une ombre noire traversa la clairière et s'abattit sur le blaireau, ma mère.
Elle lacéra le museau de l'animal bien que puissant et me pris par la peau du cou en incitant Petite joie à la suivre, je n'avais pas peur pour maman j'avais peur pour mon amie, elle était encore si jeune! La course fut folle et rapide, pour semé le blaireau qui s'agrippait à maman, quand enfin elle me posa au sol effondrée, elle ne savait pas si je vivais encore, je tentais de me relever en vain, ma queue m'en empêchait, je savais quel serait le traitement en rentrant,

Il se tourna vers Petite Joie, encore sous le choc, elle reprenait son souffle et regardait la queue de Petit Trèfle horrifiée, il lui lécha la joue,

Petite Joie

"Petite Joie!!!!!" hurla Petit Trèfle, terrifié.

Un monstre noir et blanc nous faisait face. A vrai dire, je ne savais pas ce que c'était, mais je savais d'instinct que cette chose avait pour seul but de nous exterminer. L'animal se leva, tel un Bipède, et nous fit face en nous montrant ses crocs étincelants. Je n'eus pas le temps de trop réfléchir sur la sorte d'espèce que cela était car Petit Trèfle émit :

"UN BLAIREAU!!!!"

C'était donc ça un blaireau ! Mais euh un blaireau, ça ne mangerait pas les petits chatons par hasard ? Il me semble que oui, hein ?
Le souffle coupé, glacée par la peur, je fis le mouvement typique du poisson (O,O) et resta plantée là pendant quelques secondes, qui suffisèrent à mon compagnon d'armes pour m'envoyer balader sur le côté et se jeter sur le blaireau. Hatelante, couchée sur le flanc, j'aurais voulu l'aider mais qu'est-ce que j'aurais pu faire ? Rien. Il réussi à rendre borgne le blaireau, ce qui fit auguementer sa colère. Collée à un arbre, j'aurais voulu appeler à l'aide, mais ma gorge était sèche. Devant moi ce trouvait un épouvantable carnarge. Le blaireau attrapa la queue du chaton blanc et...

Je refusa de voir cela, tant c'était horrible et saignant. J'avais l'impression que le sang venait lécher mes pattes blanches... Je ferma les yeux, traumatisée par ma vision cauchemardesque. En pensée, j'appela Cendre de Phénix, ma lieutenante, et la mère du torturé. Il hurlait tellement fort que je crus en perdre les tympans, ce cri déchirait l'âme... Les chats étaient sourds ou quoii ?? Des larmes me vinrent aux yeux. Si personne ne venait, il allait mourir... Non, il ne fallait pas penser cela, c'était trop dur, trop cruel d'enlever l'existence d'un être aussi jeune. Je murmura "Ô Clan des Etoiles, aide-nous !"

A nouveau, un bruit de pas retentit. Mais ce n'était pas un blaireau, cette fois. Je rouvris les yeux, pleine d'espoir. C'était Cendre de Phénix qui accourait à notre secours. La chatte lança un coup vers la tête du blaireau, et prit son chaton tant bien que mal. Mais le blaireau n'avait pas dit son dernier mot. Il se jeta sur ses hanches pour l'arrêter. Mais, dans un gémissement, la mère s'échappa des griffes du prédateur et courut. Aussitôt, je fila, suivant du plus vite que je pouvais les traces qu'elle laissait derrière elle. Essouflée, je me serais arrêtée si je n'avais pas entendu le blaireau essayer de nous suivre. Une bouffée d'adrélanine me monta à la tête et, dépassant mes limites, je réussis à rattraper la lieutenante, distançant le blaireau. Cette dernière s'arrêta et lâcha son petit sur le sol, avant de le renifler avec attention :

« Oh non, oh non, tu es vivant dis ? Tu es vivant ? »

Petit Trèfle essaya de se lever. Avec horreur, je compris qu'il n'y arriverait pas. Sa queue était lacérée, et des monceaux de fourrure manquaient. Et le bout...le bout...le bout était bon à couper. Partout, son corps était bourré de griffures. Je me sentis mal, moi qui était indemme et saine ! J'eus un haut-le-coeur en me rapprochant de lui. Du sang perlait de toutes ses blessures, et sa queue faisait peine à voir. Couché, le chaton si intrépide et si aventureux leva une tête triste et terriblement changée vers sa mère :

- Je suis désolé maman, je voulais partir à l'aventure, j'ai attrapé ma première proie et puis j'ai défendu Petite Joie contre ce blaireau, je l'ai blessé à l'oeil j'ai peut être blessé mon amie, je ne voulais pas maman je te jure mais quelque chose me pousse à agir, je...je crois que j'ai perdu l'usage de ma queue en son bout et Fleur de Pas-d'âne sera surement obligé de me couper les tendons déchirés et je vais surement devoir rester dans son antre un quart de lune mais je ne regrette pas d'être sorti maman parce que j'ai vue ce qu'était la vie d'un guerrier et je serais un guerrier qui n'a peur de rien et qui mettra au tapis ce blaireau si il le revoit.

Le coeur serré, j'écouta ces paroles digne d'un guerrier. Plus jamais il ne sera le même, plus jamais il ne retrouvera l'enfance et son insouciance, pensais-je. Plus jamais... Je retins mes larmes. Je devais être forte pour deux, à présent, même si Petit Trèfle ne mourrait pas. Je devais être heureuse qu'il m'ait sauvée et reconnaissante. Ce que j'étais bien sûr. Mais derrière se cachait le remords de ne pas l'avoir aidé, d'avoir été trop sotte de ne pas l'arrêter et de ne pas l'obliger à fuir... Il tourna la tête vers moi et me comprit. Il me lécha la joue et ajouta :

- Petite Joie, je suis tellement désolé, tout ça est ma faute j'aurais voulu pouvoir te protéger de ce danger, je m'en voudrais toujours de t'avoir amenée avec moi, ne t'inquiète pas, moi ça ira d'accord et puis tu pourras toujours venir me voir chez Fleur de pas-d'âne.

Le fait qu'il mette sur lui toute la responsabilité de l'accident alors que lui seul avait été blessé me choqua. C'était à moi d'être désolée, j'aurais dû l'arrêter, j'aurais dû réfléchir, j'aurais dûy lui dire de rester à la Pouponnière ou dans le camp, c'était à moi de prévenir tout cela, j'étais plus jeune mais logiquement la vérité sort de la bouche des enfants non ? Donc c'était de ma faute. Ce ne serait jamais à lui que j'en voudrais, mais à moi, et à moi seule. Pour ma petite âme, j'étais entièrement responsable de ce qui était arrivé... Et en plus je me retrouvais indemme ! Saine et sauve ! Je m'écria, dans un cri du coeur :

- C'est à cause de moi ! C'est de ma faute ! Oh, je suis tellement désolée... Pourquoi suis-je assez bête pour ne pas t'avoir aidé !

J'éclata en sanglots pour de bon, incapable de surmonter ce trop-plein d'émotions, cet événement, tout cela était de trop dans ma petite vie de gamine. Moi aussi, à ma manière, j'étais obligée de mûrir à l'avance.

[tadam ! C'est nul >_< Après ce sera Pas-d'âne qui s'occupera de toi ?]

Cendre du Phénix se pencha sur son petit, plus affolée que jamais. Elle vit alors qu'il respirait, il était juste un peu assomé. Il tenta de se lever mais s'effondra lamentablement au sol. Etait-il belssé ? Une petit flaque de sang se caillait sous le petit. Puis la noiraude remarqua avec un petit cri d'effroi qu'il manquait presque la moitié de la queue du chaton. La reine ne pouvait croire que son fils avait fait une bêtise aussi idiote et en perdre de ce qui lui permettait de garder son équilibre sur les arbres et les rochers. Pauvre enfant ! Elle donna un coup de langue sur le crâne de ce dernier comme pour s'assurer qu'il réagirait. Puis Petit Trèfle entama son récit, la raison pour laquelle il s'était enfui avec une camarade, comment ce blaireau était arrivé... La lieutenante eut un regard dur et feula à l'intention de son fils :


« Espèce d'idiot ! Cervelle de souris ! Tu ne te rends pas compte de la gravité de ton acte ? Tu aurais put y perdre bien plus que ta queue ! Aurais-tu oublier que Petit Fruit et Petite Beuatée sont mortes ? Qu'un troisième chaton mort sur la conscience m'aurait rendu malade de tristesse ? Je ne veux plus jamais que tu recommences ça jusqu'à temps que tu es un mentor digne de ce nom ! »

Malgré ses paroles punitives, Cendre du Phénix s'en voulait à mort. Tout était de sa faute, si elle avait été une meilleure mère, plus attentive, son petit n'auraitjamais eu cet accident. Il aurait pu mourir, pire encore, ces deux petits auraient pu mourir ensemble ! la guerrière secoua la tête, essayant de chasser d'horribles images défilant dans sa tête de petits corps démembrés de ses petits. Puis elle se tourna vers Petite Joie et dit sur un ton toujours aussi tranchant :


« Quant à toi, tu as très mal fait aussi. Je rapporterai ton comportement à Zeste de Citron et on verra bien comment elle réagirai. Allez, on rentre au camp, dépêchez vous. »

Elle se mit debout avec une grande difficulté, grimaçante de douleur, mais tenta d'avancer. Elle ne voulait pas que les deux petits sachent qu'elle était blessée... Elle ne savait même pas ce qu'elle avait.